Dans le contexte des guerres de religion, la victoire militaire est un signe indiscutable d’intervention divine. Dans l’esprit du camp victorieux, c’est bien Dieu lui-même, redevenu pour un temps le « Dieu des armées », qui remporte le combat : le héros victorieux – le roi, un prince de sang, ou un capitaine renommé – n’est d’abord que le « bras armé » de la Providence. Célébrer une victoire et louer Dieu se confondent dès lors dans un même acte lyrique : la célébration de l’« hymne » ou du « cantique de victoire » (ou encore « triomphal »), un genre poétique exploité autant par les catholiques que par les protestants dans un souci de propagande spirituelle et politique. Cette publicité poétique est animée par un double objectif : défendre et justifier sa foi, et fustiger celle de l’autre ; rendre visible une histoire collective orientée par la Providence, et effacer toute trace de l’histoire adverse.
Je souhaiterais étudier, à travers un corpus significatif de poèmes relatant des victoires militaires catholiques [1], le traitement poétique et l’exploitation idéologique de cette circonstance absolue et définitive qu’est la victoire, « heure fatale » pour les ennemis de la vraie foi, nécessairement aveuglés par l’audace et la démesure, et « heure triomphale » pour ses défenseurs, guidés et appuyés par Dieu – lequel, bien sûr, « a reconnu les siens ». Si ces poèmes sont de composition variable – plus ou moins longs, ils oscillent entre le chant lyrique strophique et la narration héroïque en vers à rimes plates – ils présentent néanmoins un même schème hymnique : le moment historique de la victoire y est célébré jusqu’à la sacralisation, jusqu’à sa sortie hors de l’histoire. L’« heure fatale » ou « triomphale » ne désigne pas seulement un moment de vérité, mais le moment même de la Vérité, que le poète a pour mission de saisir, de célébrer et de transmettre. Dans la victoire se combinent hasard de l’engagement et instant décisif, violence guerrière et gloire martiale, désordre et ordre du temps [2].
L’hymne triomphal renaissant puise son inspiration dans différentes sources antiques et bibliques où le traitement du temps est variable. Le combat épique, notamment homérique, engage le destin du héros à travers sa renommée (kleos) et le court instant de la victoire a pour fonction de projeter en avant un temps glorieux. Dans l’Ancien Testament, les récits de bataille rappellent que le roi est chargé d’exécuter la volonté divine en garantissant l’ordre contre le chaos : Dieu intervient naturellement dans la guerre, provoquant panique et effroi chez les ennemis, recevant louanges et offrandes des vainqueurs. La poésie lyrique triomphale, enfin, amplifie le moment de la victoire par la rhétorique de l’éloge et l’inscrit dans une solennité jubilatoire : les péans antiques constituent autant à ce titre des modèles que les psaumes de victoire ou de délivrance. Chacun des textes du corpus mélange ces éléments selon un dosage variable ; mais tous procèdent à une même valorisation de l’« heure triomphale ». Plusieurs questions peuvent nous aider à éclairer les modalités de cette valorisation. Tout d’abord, comment distinguer ce moment précis comme point culminant, acmé narratif dans le récit poétique de la bataille ? Comment, ensuite, transformer l’« heure fatale » en « signe fatidique », en moment privilégié soudain signifiant faisant basculer d’un ordre de réalité dans un autre ? Comment, enfin, faire passer cette « heure » historique, circonstanciée, en un temps anhistorique, celui de la Vérité divine ? Il s’agira de déterminer dans quelle mesure le travail poétique (en relation avec le genre particulier de l’hymne triomphal et l’ethos spécifique du poète-hymnode) permet de transformer la relation lyrique de l’« heure fatale » en une véritable vision orientée de l’Histoire, assurant le triomphe de l’orthodoxie catholique.
Les « misères du temps », l’« heureuse journée » et l’« heure fatale » : les circonstances du cantique de victoire
Quelle que soit leur ampleur, les hymnes triomphaux du corpus étudié mettent en scène trois types de temps historiques, unis par des rapports d’inclusion : la durée infinie des désordres civils est interrompue par le jour glorieux de la victoire, et ce jour heureux contient, comme dans un écrin, l’heure même du coup fatal, moment particulièrement dense vers lequel tous les autres temps convergent. Chez les poètes catholiques, la victoire célébrée apparaît nettement comme un événement privilégié prélevé sur le fond dramatique des « misères de ce temps », au sens ronsardien de l’expression. L’apparition et le développement de la Réforme protestante sont en effet présentés comme une durée scandaleuse, comparable à l’avancée irrépressible d’une « hérésie errante » (Billard, v. 261 ; voir aussi Ronsard, L’Hydre, v. 67-74) ou à la propagation mortelle d’« [un] heretique venin » (Nouvelet, v. 172). En d’autres termes, l’hymne de victoire rappelle toujours quelle fut l’impérieuse progression de l’« erreur » :
Quelle gresle, quel orage,Dieux ! quelle estrange fureur,Quel affront, quel brigandage,Quel massacre, quel horreur,Souffre nostre nourriciereFrance, ja par tant d’HyversPortant ses deux flancs couversD’une vermine estrange ? (Belleau, v. 57-64)
Chez Belleau, le tableau des misères du temps constitue même la première moitié du Chant de triomphe (v. 1-120) et c’est sur l’historique des troubles que repose également la longue première partie de l’Hymne de victoire de Billard [3]. L’image de la succession des hivers est fréquente : elle traduit autant l’engourdissement des consciences que l’expérience d’un temps stérile [4]. C’est pourquoi « ce temps » chaotique peut conduire à un étouffement de la voix lyrique, comme chez Baïf qui, tout en entonnant au roi une ode De la victoire de Moncontour, remet à plus tard la véritable louange :
Par ce tems je n’ose entreprendre,Estourdi du public malheur,De ma foible voix faire entendre,O Freres [Charles IX et Henri d’Anjou], vostre sainct honneur.Mais un jour remis en aleine,Puissé-je avoir la bouche pleine. (v. 55-60 ; nous soulignons)
La difficulté de chanter la victoire est un thème fréquent, qui souligne paradoxalement le caractère extraordinaire et surprenant de l’événement célébré, surgissant d’un long temps de malheurs [5].
La journée victorieuse vient en effet rompre avec éclat cette progression chaotique mais irrésistible du temps de l’hérésie : avec elle sont en quelque sorte « [forcés] tous les Desastres / Du temps » (Belleau, v. 241-242). Dieu victorieux agit soudainement « Sus le pecheur mutin, qui se mocquoit de nous / Et qui cent fois le jour irritoit [sa] clemence » (Dorléans, v. 53-54) et Charles IX fait tomber comme un couperet la Saint-Barthélemy « Voyant que ce malheur [i. e. l’hérésie] trop longuement duroit, / Et que pour le pervers le bon peuple enduroit » (Hymne du roy Charles IX, v. 19-20). Pour mettre en valeur l’effet de rupture provoqué par la victoire, l’hymne oppose aux « malheurs de ce temps » le motif de la « journée heureuse » qui, malgré sa résonance psalmique et marotique, nourrit aussi le lyrisme triomphal catholique : « Voicy le jour que fit Yahvé / pour nous allégresse et joie » chante le psaume 118 (verset 24) [6]. La référence est plus nette chez les poètes proches des Politiques, et l’ouverture de l’Hymne sur la journée de Salbertrand d’Expilly est en ce sens parfaitement emblématique : « Je chante, Callignon, ce beau jour de victoire, / Qui combla Lesdiguière, & la France de gloire » (v. 1-2) [7]. La rime inaugurale victoire / gloire souligne d’emblée la singularité du jour, et la répétition régulière dans l’hymne des expressions « ce beau jour » (v. 8), « ce jour » (v. 75), « ce jour là » (v. 86), « aujourd’huy » (v. 98) et « le jour » (v. 132) confère à l’événement célébré une densité certaine, à laquelle tout retourne [8]. C’est bien l’« honneur de la Journée » (Robin du Faux, v. 205) qui motive les combattants. L’« heureuse journée » renvoie moins en effet à un découpage temporel objectif (une date) qu’à un segment symbolique caractérisé à la fois par une extrême condensation de sens et par une sorte de dilatation, dans la mesure où les hauts-faits héroïques s’y multiplient. L’effet de convergence vers ce jour devenu unique est mêlé au sentiment d’une étonnante soudaineté, comme lors de la Saint-Barthélemy où
Tous rebelles François ont senty son [Charles IX] pouvoirEn un jour, conformant leur fin & destineeA leur voulonté dure & fureur obstinee. (Hymne du roy Charles IX, v. 82-84)
Le poète peut traduire explicitement l’idée de coupure interrompant la durée funeste des malheurs. Chez Belleau, la première occurrence du déictique « maintenant », qui désigne la victoire et ouvre sur le temps du « repentir », fait écho à un second « maintenant », lequel renvoie au présent du chant de célébration : la rupture, en deux étapes, avec le temps du « deuil » (v. 92) est dès lors définitivement consommée [9]. Robin du Faux emploie l’image d’un long incendie « aujourd’huy » subitement éteint (v. 81-86). Pour Dorléans, le jour victorieux est celui, jubilatoire, du châtiment des méchants, et il se confond avec le présent, décisif et incisif, de la parole de Dieu, qui exhorte le roi à une vengeance rapide et définitive, profitant du succès de Jarnac [10]. Dans son Ode adressée à Belot célébrant cette même victoire, Amadis Jamyn traduit la rupture « joyeuse » dans un ton différent, typiquement bachique :
Avant ce jour plein de clarté divineNous ne tastions ny la pipe AngevineNy ton vin Bordelais,Quand le rebelle orgueilleux à outranceFol menaçoit de son trespas la France,Et le Sceptre Gaulois. (v. 7-12)
Plus expressif, le Chant triomphal ronsardien suggère l’image d’une tête coupée :
Il [Henri d’Anjou] a tranché le lienGordienPour noz bonnes destinées,Il a coupé le licolQui au colNous pendoit dés huit années (v. 31-36)
La comparaison entre la Réforme et l’Hydre, monstre à trois têtes, est ici explicite ; Ronsard la systématisera dans L’Hydre deffaict (v. 91-117) célébrant en Henri d’Anjou celui qui « coupa les chefs au serpent Hugnotique » (v. 184). Elle pourrait être lue comme une allégorie à valeur temporelle : l’image illustre en effet la logique d’une répétition obstinée du malheur dans la mesure où, même sans tête, l’hérésie survit (Ronsard, L’Hydre, v. 139-154) [11]. C’est pourquoi Dorat, identifiant les trois têtes coupées de l’Hydre aux trois chefs protestants battus entre octobre 1568 et octobre 1569 (Mouvans à Mussignac, Condé à Jarnac, et Coligny à Moncontour), insiste sur la signification symbolique de ce triple arrêt provoqué par le roi Charles IX « ayant trois fois dans l’an [son] ennemy rengé » (Chant triomphal, v. 15).
Au cœur de la journée heureuse se loge l’instant même du basculement. La composition de chaque hymne laisse diversement présager l’apparition de ce moment décisif, véritable climax d’une action dramatique relatée linéairement ou non. Les pièces choisies relèvent en effet du genre de l’hymne ou du cantique : elles mêlent à une action de grâces et une louange de Dieu la relation élogieuse des exploits du vainqueur. D’une facture très lyrique (l’usage de la strophe y est systématique), et peu développées en longueur, les pièces d’Amboise, Ronsard (Chant triomphal), Dorat (Chant triomphal) et Jamyn sont des chants de liesse prolongeant la joie communautaire de la victoire, peu précis dans la relation des événements mais insistant au contraire sur une transfiguration de l’acte héroïque. Le moment décisif y est cependant nettement thématisé par les motifs de la rupture, de la chute ou du renversement [12]. Le Chant de triomphe de Belleau, plus développé, présente un état intermédiaire, où lyrisme triomphal et narration héroïque s’équilibrent : l’instant crucial y est également thématisé, au cœur du récit de combat, par l’association de la vitesse et du renversement :
Soudain à teste baisséeIl [Henri d’Anjou] enfonce dans leurs rancsPesle mesle entrant dedans,Et la troupe a renversé (v. 309-312)
Plus proche de la psalmodie (les sizains numérotés s’y enchaînent comme des versets), le Cantique de Dorléans développe une parole à la fois plus politique et plus spirituellement engagée : après une relation de la bataille quasi hallucinée plus que circonstanciée, l’hymnode laisse la parole à Dieu qui exhorte le roi à lui être fidèle. La vision du combat insiste d’emblée sur l’intervention divine inaugurale provoquant la chute : « C’est luy tout le premier qui a donné dedans / Renversant noz haineux qui luy estoient contraires » (v. 11-12) ; et l’intervention du duc d’Anjou dans la bataille rappelle Belleau : « Suivy de noz soldatz brusquement animez, / Il a foncé rompu les bataillons armez » (v. 88-89). C’est aussi à travers une vision que Nouvelet évoque le « bras victorieux » du roi, s’abattant, la nuit de la Saint-Barthélemy, « Sus le chef des seditieux / Lançant la justiciere foudre, / […] Pour froisser, rompre & mettre en pouldre / Les vostres, & siens [de Dieu] ennemis » (v. 63-68).
Les poèmes de Billard et Expilly sont emblématiques de l’infléchissement épique et narratif que connaît l’hymne de victoire à la fin du siècle. Toujours encadrée, conformément à la structure hymnique, par une invocation initiale (au dédicataire ou à la Muse) et un envoi (prière à Dieu ou vœu au dédicataire), la relation des événements est amplifiée : l’« avant » et l’« après » du coup fatal y sont facilement repérables. L’utilisation d’une suite d’alexandrins à rimes plates accentue cette dimension d’epyllion. Chez Expilly, c’est un distique isolé, véritable articulation narrative, qui distingue à chaque fois l’instant crucial où tout est décidé :
Là trois mille estrangers, sans perdre un seul des tiens [de Lesdiguières]Se trouvent envoyez aux creux Tenariens. (Hymne sur Pont-charra, v. 155-156)
Voyla tout abattu, ceste effroyable nuë,Ceste gloire Espagnolle au vent s’est espenduë. (Hymne sur Salbertrand, v. 133-134)
L’utilisation du déictique vient figer l’image du moment fatal devenu, au sens propre, un instantané [13]. Billard, relatant les victoires de Vimory et Auneau remportées par le duc de Guise sur les reîtres suisses et allemands, mêle le thème du revers de Fortune à une épiphanie de la déesse Victoire :
Deus mil y [dans le château d’Auneau] sont perdus, deus mil’ & d’avantageCoucherent de leur reste en ce sanglant carnageJouet de la fortune, & du sort malheureuxQui selon le merite a tombé dessus eus.La victoire en volant vint revoir nostre prince [le duc de Guise]Acheva le traité, deschargeant sa ProvinceDes Cantons effraiez… (v. 473-479) [14]
Malgré sa dimension parfois très lyrique, l’hymne de victoire sait utiliser toutes les caractéristiques du temps épique pour mettre en valeur à la fois la « journée heureuse » et l’« heure triomphale » sur le fond des « malheurs du temps ». Dans la mesure où elle est fragmentée, segmentée en événements distincts, la temporalité épique [15] laisse en effet aisément surgir, parfois en le répétant, souvent en exploitant un effet de retardement, l’instant crucial qui décide de la victoire. Bien plus, chaque hymne apparaît comme le fragment d’une épopée plus vaste, celle, par le camp catholique, de la reconquête d’un Âge d’Or où se conjuguent gloire de la monarchie française et règne de l’orthodoxie. Mais le mélange de ces différentes temporalités et l’effet de segmentation ne permettent pas seuls de mettre en valeur ce moment décisif. L’adaptation à la célébration triomphale des topoï héroïques, et dans une moindre mesure bibliques, permet de constituer une véritable poétique de l’« heure triomphale », reflet de l’éthique du vainqueur. L’« heure fatale » devient dès lors « signe fatidique ».
De l’« heure fatale » au « signe fatidique » : poétique et éthique de la victoire
Le moment du triomphe s’inscrit dans un décor et une dramaturgie qui le mettent en évidence comme événement singulier et signifiant. La comparaison entre la bataille et une tempête, un motif typiquement homérique, permet de délimiter un espace-temps particulier, situé hors de l’ordre normal du monde, hors du cycle habituel des saisons [16]. La tempête peut cependant apparaître de deux manières différentes, selon qu’elle désigne les malheurs du temps soudain dissipés par l’éclaircie de la victoire, ou qu’elle est au contraire l’image de la colère de Dieu s’abattant sur les ennemis pour les engloutir, comme dans le chant de victoire entonné par Moïse, célébrant la déroute de Pharaon (Ex 15, 1-18). L’image est si importante qu’elle constitue la première partie de l’ode De la victoire de Moncontour de Baïf (v. 13-48) : le poète en mal d’inspiration se compare à un navigateur dont « la nef du peril menassee / De tourmente forte est brassée » mais « [qui] revoye la gaye lumiere / Du Soleil plus net que devant » (v. 35-38) et, ce faisant, peut « faire retentir l’immortelle gloire / D’une bien heureuse victoire » (v. 47-48). Charles et Henri de Valois sont les astres jumeaux qui conduisent les « nochers » [17], c’est-à-dire les poètes et, derrière eux, la France. L’intempérie tragique qu’est la rébellion peut aussi prendre la dimension d’un mythe, comme chez Robin du Faux (v. 221-238). Le contraste entre l’orage et l’éclaircie est au cœur de nombreux hymnes. Chez Belleau, l’« orage » que le duc d’Anjou s’apprête à « esclaircir » (v. 189) est à la fois celui de l’hérésie (v. 57) et celui du combat, lorsque « Le ciel fremit de l’orage / Des coups, des cris et du son » (v. 261-262). Le même pouvoir est attribué, lors de la Saint-Barthélemy, à Charles IX
Esclaircissans le temps d’une horrible tempeste,Et purgeant le pais d’une puante peste. (Hymne du roy Charles IX, v. 105-106)
Expilly compare aussi le début de la bataille de Pontcharra à la naissance d’un orage (v. 137-145) que vient in fine dissiper le dédicataire de l’hymne, Forget « dont le clair jugement est l’astre de la Court » (v. 164). Même lorsque l’orage, le tonnerre, le torrent ou le déluge sont l’expression de la colère divine ou héroïque [18], la tempête n’est que le signe avant-coureur d’une exceptionnelle clarté, à l’exemple d’Henri d’Anjou chez qui
On reconnoist au reluisant visageQui eblouist avec rayons dorezDu clair Soleil les enfans honorez. (Baïf, v. 88-90) [19]
La « grande lumière épique » qui éclaire la victoire en éclaircit aussi le sens [20].
De même que la tempête singularise le jour de la victoire en l’identifiant à une force naturelle hors du temps, de même l’éblouissante clarté qui inonde finalement le champ de bataille, puisqu’elle en découpe nettement les lignes et les contours, isole symboliquement ce moment privilégié. En localisant l’action sur une « plaine », l’hymnode ne se contente pas d’insérer dans son poème un motif proprement homérique pour en accroître la couleur héroïque : la sobriété du décor permet aussi d’insister par contraste sur l’importance fondamentale du moment. Le « champ » nettement découpé du combat, que vient parfois circonscrire un ou plusieurs fleuves [21], est à l’image de la séquence temporelle et narrative. Dans l’hymne de victoire, l’espace se confond avec le temps, ou plutôt le lieu s’éclipse devant l’importance de l’« heureuse journée ». Le moment devient lisible, se transforme en vision, l’espace dégagé facilite la saisie d’un signe : « Jo guerriers, je voy par les campaignes / Flamber le fer, & blanchir les enseignes » (Amboise, v. 55-56) ; « leurs corps [des ennemis] servent aux champs de pasture » (Ronsard, Chant, v. 66, var. 1569) ; « O Dieu, que de plaisir alors nous recevions, / Que de plaisir, Seigneur, quant ainsi nous voyons / D’escadrons bien serrez la campagne couverte » (Dorléans, v. 91-93) ; « assez connoist le champ de Moncontour » ou « Je les [mutins] ay veu la campagne couvrir / Qu’on veit de loin dessous leurs corps blanchir » (Jamyn, Cantique, v. 35 et v. 55-56) ; « …le tien assault guerrier / A son dam a congneu l’horrible Dragon fier / Chatillon, tel que cil qui assiegeoit la plaine, / Que jadis arrousoit l’onde Castallienne » (Dorat, Hymne de victoire, v. 21-24) ; « et attirant [l’Hydre] en la plaine au combat / De ces trois chefs le dernier luy abbat » (Ronsard, L’Hydre, v. 137-138) ; « Entre l’une et l’autre rive, / Dessus la plaine de Gron, / De Toüé et de la Dive,/ [les troupes] Se rangent en escadron » (Belleau, v. 217-220) ; « Soudain le champ est largement bagné / Du traistre sang des Rebelles parjures » (Robin du Faux, v. 252-253) ; « …c’est à nous de l’honneur / Mais à eux [les reîtres] de la perte, & du sanglant malheur : / Ce sont les champs couverts de charognes infectes » (Billard, v. 555-557) ; « Tu [i. e. Lesdiguières] as du grand Henri les hayneux combattu / Aux plaines de Bayard, plaines fameuses plaines, / Du nom, & du combat de deux grands Capitaines ! » (Expilly, Hymne sur Pont-Charra, v. 28-30 ; nous soulignons à chaque fois) [22]. Dans le prolongement de ce motif, le thème épique de la « moisson des guerriers » (Énéide, VII, 720 et 809) prend aussi un sens particulièrement fort, en relation étroite avec le thème de l’« heure fatale ». Si en effet, des « mutins », le vainqueur ou Dieu « frappe leurs yeux & les rend estonnez / A fin qu’au glaive ils soyent tous moissonnez » (Jamyn, Cantique, v. 47-48), c’est bien parce qu’on se situe au moment opportun de la récolte [23] ; l’image ne traduit pas seulement la facilité de la victoire ou la fragilité des vaincus, elle souligne aussi sa dimension d’instant propice : la victoire arrive à l’issue d’un combat de saison.
La netteté de la mise en scène aide le poète à focaliser l’attention sur le protagoniste et sur son action héroïque. Le motif récurrent du « bras armé » ou de la « main », à la fois « vengeresse » et « vertueuse » (Amboise, v. 52 et 61), véritable synecdoque du héros victorieux [24], permet aussi de rendre visible l’instant décisif : la main du vainqueur est à la fois celle qui fauche les ennemis et celle qui écrit leur destinée. L’effet de gros plan contribue à rendre plus sensible la rapidité prodigieuse de la victoire, signe évident d’un appui divin :
Ce que les vieux n’avoient sceuTu l’as peuParachever en une heure… (Ronsard, Chant, v. 91-93)C’est peu c’est peu que vostre main hastiveLes ait chassés d’une fuite craintive… (Amboise, v. 103-104)Et ton bras fort les a tous poudroyezComme une poudre en un rien consommee… (Jamyn, Cantique, v. 82-83)O Lesdiguiere heureux, le Ciel a par ta mainCes Titans accablez en moins d’un tournemain… (Expilly, Hymne sur Salbertrand, v. 135-136)
Le héros maîtrise le temps, il le manie comme il le souhaite, sous la protection de Mars qui, rappelle Belleau, est un dieu qui « mesnage le temps » (v. 306) et qui, souligne Ronsard, s’associe significativement à Jeunesse pour favoriser le duc d’Anjou (Chant, v. 108). Dieu des victoires, Mars apparaît donc aussi comme « une sorte d’organisateur de la durée des combats » [25] ; et c’est sans doute à ce titre, aussi, qu’il est mentionné dans la plupart des hymnes triomphaux. Mais le motif de la « main vengeresse » est également biblique : c’est avec sa main que Moïse dirige, du haut d’une colline, le combat mené par Josué contre les Amalécites (Ex 17, 8-16). C’est pourquoi la description vivante du combat – l’« effect evidant », dit Dorat (Hymne de victoire, v. 2) – plus ou moins circonstanciée selon la nature de l’hymne, s’achève presque toujours sur l’image figée des ennemis, pour qui le temps s’est définitivement arrêté. Là encore, les motifs épiques des corps entassés et / ou laissés sans sépulture (Iliade, XXII, 350 sq) ont une résonance particulière dans la logique de l’« heure triomphale ». Montrer les ennemis de la foi « l’un dessus l’autre abatus pesle-mesle » et « espandus par monceaux » (Jamyn, Cantique, v. 52 et 63) ou « sans sepulture, / Et sans honneur de tombeaux » (Ronsard, Chant, v. 63-64) [26], c’est tout à la fois les réduire à un signe vide et, ce faisant, les exclure de l’histoire. Cet instantané – l’effet a déjà été relevé – d’une masse informe et désormais insignifiante est l’envers d’un autre instantané, celui du vainqueur en gloire, apparaissant dans une sorte d’épiphanie héroïque (cf. Ronsard, L’Hydre, v. 75 : « Ainsi ce Duc s’apparut à nos peines » ; voir aussi Belleau, v. 313-320, Dorat, Hymne, v. 94-98 ou Expilly, Hymne sur Salbertrand, v. 71-82).
Si le héros victorieux maîtrise ainsi de bout en bout le temps de sa victoire, s’il est en mesure d’immobiliser à jamais son « heure triomphale », c’est que certaines vertus lui octroient cette maîtrise. La poétique de l’instant décisif reflète aussi l’ethos de celui qui, avec l’aide de Dieu, en est l’instigateur et l’organisateur. L’Hymne du tres-chrestien roy Charles IX raconte ainsi la « victoire » de la Saint-Barthélemy, non par une relation précise des événements, mais à travers les qualités éthiques du roi, et notamment l’association de la force et de la ruse : « A la peau du Lyon il cousut le Renart, / Et luy manquant la force il recourut à l’art » (v. 11-12). C’est l’association de ces deux « qualités », typiquement machiavéliennes, qui l’aide à saisir le moment opportun :
Le temps semblablement contrerolleur de toutEn luy obeissant l’a fait venir à bout,D’un protraict si heureux, avecques l’assistanceD’occasion sa femme, & fille patience (v. 69-72)
Cette capacité « [à] venir à son poinct, & à l’heure opportune / Sous le vouloir de Dieu accrocher la fortune » (v. 145-146) est systématique chez le vainqueur. Elle l’autorise à « parfaire ceste afaire » (Dorat, Hymne, v. 67-68 ; voir aussi Ronsard, L’Hydre, v. 155), à amener à maturation le temps du triomphe. Dans les célébrations des victoires de Jarnac et de Moncontour, Henri d’Anjou, « le nourrisson de Fortune prospere » (Ronsard, L’Hydre, v. 7), apparaît à la fois « fort » et « prudent » [27] ; et c’est bien cette dernière vertu qui permet au vainqueur de saisir l’occasion de la victoire, de « se hasarder » au combat – l’expression est récurrente [28] – tout en se jouant de la « Fortune au vouloir inconstant » (Expilly, Hymne sur la journée de Salbertrand, v. 55 ; voir aussi Robin du Faux, v. 195 sq). Le thumos du héros homérique – cette décision qui le pousse à agir – se caractérise ici par une volonté de contrôle sur le temps. Dans les hymnes d’Expilly, le portrait moral du capitaine Lesdiguières est particulièrement développé, et correspond davantage à l’esprit « fin de siècle » : la prudence y est vraiment un art raffiné du calcul stratégique, où l’« œil sçavant » décide à la fois du « lieu favorable » et de l’« occasion » (Hymne sur la bataille de Pont-Charra, v. 83, 85 et 96) [29]. Mais les vertus héroïques sont avant tout des dons divins. Le « bras armé » du vainqueur est celui de Dieu, arrêtant la marche de la Réforme – ou plus tard, de la Ligue. L’hymne triomphal catholique, parce qu’il est d’abord un hymne, a pour fonction de faire passer l’« heure triomphale » du temps historique dans un temps liturgique, réorientant définitivement, par le chant sacré, le destin de la monarchie française et du peuple catholique.
De l’« heure fatale » à l’« heure liturgique » : sacralisation et solennisation du triomphe
Les poèmes étudiés relèvent tous du genre hymnique ou s’en approchent : la narration élogieuse de la victoire s’inscrit dans un lyrisme religieux dont la fonction est de transposer l’événement hors de l’histoire, dans un temps liturgique, cyclique, où il sera sans cesse célébré comme émanation du pouvoir de Dieu. Mais les hymnes de victoire catholiques n’ont rien d’orthodoxe. La transformation de l’« heure triomphale » en « fête solennelle » repose sur un processus de sacralisation de l’événement militaire qui s’appuie entre autres sur l’usage des mythes antiques, dans le prolongement de l’esthétique poétique de la Pléiade. Loin d’être seulement un événement, la Victoire est une divinité, ou un signe de la puissance divine : elle est à ce titre rangée parmi les numina [30]. Mentionnée implicitement comme déesse chez Ronsard (Chant, v. 99) et Belleau (v. 353), son allégorie est même amplement développée chez Robin du Faux (v. 97 sq) et Billard (v. 353 sq), qui en font une fille de Jupiter ou de Dieu. L’intervention de la déesse Victoire est étroitement associée à la révolte des Géants, dont le mythe – ou parfois le seul motif – réapparaît constamment dans le lyrisme triomphal catholique :
Mais plus divins apparoissent tes faicts [Henri d’Anjou]D’avoir du tout ces fiers Titans deffaictsQui renvoyent mille bras, mille testesEn morions tousjours au combat prestes :Gent conjuree à rompre & renverserLes fleurs de Lys que tu sçais redresser. (Jamyn, Cantique, v. 73-78)
La reprise fréquente du thème dans notre corpus n’est pas de pure convention [31] : elle souligne la cohérence idéologique du lyrisme catholique, et sa valeur communautaire, sa capacité à inventer des valeurs. Le mythe des Géants indique une horreur de l’hybris et suppose l’imminence du retour de l’Âge d’Or et de la Paix, autre mythe structurant de l’hymne de victoire, généralement associé à l’envoi ou prière finale de l’hymne :
Vostre victoire apportera en FranceAu craintif peuple une libre asseurance,Et le Dieu thracienEstant chassé, & banie la guerre,La paix viendra transmise en ceste terreDu ciel Olympien. (Amboise, v. 127-132) [32]
L’« heure triomphale » constitue de fait un point temporel inséré entre révolte des Géants et retour de l’Âge d’Or. Ainsi encadrée par deux mythes poétiques privilégiés chez les poètes de la Pléiade et leurs successeurs, elle prend elle-même une dimension mythique, et s’inscrit dans la liturgie d’un pouvoir monarchique entièrement dévoué à la conservation de l’ordre. La victoire vient confirmer à nouveau le lien indéfectible entre la « Loy » et la « Foy » (Dorat, Hymne, v. 133-134). En ce sens, la récurrence de la rime victoire /gloire (ou mémoire) [33] traduit cette tension ou cette projection, constamment à l’œuvre dans l’hymne, vers un avenir ordonné et lumineux de la monarchie de droit divin, le poète-hymnode adaptant le thème du kleos de l’épopée homérique à la communauté catholique tout entière, rangée derrière son vainqueur et son roi. L’instant décisif de la victoire contre l’hérésie dépasse et parachève logiquement les victoires les plus prestigieuses de l’histoire [34] dans la mesure où elle scelle le destin de la France, où elle le réoriente selon un plan définitif décidé par Dieu.
L’hymne triomphal catholique ne cesse en effet de répéter que c’est Dieu lui-même qui donne la victoire. L’« heure triomphale », don de Dieu aux hommes vertueux et obéissants, a pour réponse l’« heure liturgique » du chant hymnique, don des hommes à Dieu, généreux et favorable. On retrouve là la logique proprement hymnique de la charis, cet échange bienveillant entre hommes et dieux qui se noue dans le chant sacré : la victoire est un acte divin qu’il faut reconnaître et remercier en une louange incessante. Ainsi s’effectue le processus de solennisation qui transforme l’occasion héroïque de la victoire (saisie par la prudence d’un seul) en occasion liturgique du triomphe (saisie par la foi de tous). Le chant hymnique transforme la circonstance historique en fête religieuse (solennité), dont la célébration revient tous les ans, comme le rappelle Ronsard dans L’Hydre :
Devant le Temple à vous, Freres, sacré [Charles IX et Henri d’Anjou]Soit en la plaine ou au milieu d’un pré,Me souvenant de vos belles conquestes,Feray des jeux et choumeray vos festes. (v. 189-192) [35]
Cette dimension liturgique de l’hymne de victoire est déjà présente dans le Chant triomphal de 1569, qui mêle action de grâces à Dieu, louange du nom (du vainqueur) et tonalité jubilatoire :
A Dieu grace nous rendonsEt fendonsL’air souz l’hynne de victoire,Poussant gaillars et joyeuxJusqu’aux CieuxTon nom, tes faits et ta gloire. (v. 97-102)
Certes, Ronsard tend à partager la « gloire » entre Dieu et Henri d’Anjou : c’est là une constante des chants de victoire catholiques, qui insistent particulièrement sur l’aura du vainqueur. Mais c’est bien l’action divine qui, à travers l’acte glorieux du prince, est solennellement célébrée dans l’hymne, faisant du jour de la victoire une fête liturgique [36]. Les hasards de l’histoire facilitent parfois l’insertion du jour triomphal dans la logique rituelle : les poètes catholiques n’ont pas manqué de remarquer que la Saint-Barthélemy tombait la veille de la Saint-Louis, rapprochant les deux fêtes au nom d’une même liturgie monarchique ; ainsi Nouvelet considère-t-il la Saint-Barthélemy comme un « beau jour » puisque c’est « la veille & le jour de la feste, / Dont la France le [saint Louis] veneroit » (Nouvelet, v. 77 et v. 84-85).
La sacralisation de la victoire et la solennisation de l’événement ne constituent pas des procédés anodins : elles assurent au poète une fonction indispensable en tant que panégyriste de la monarchie et nécessaire relais entre Dieu, le roi et la communauté – même si cette fonction sacrée, ardemment défendue par les poètes de la Pléiade, tend à perdre de son importance à la fin du siècle. Tour à tour visionnaire, vates inspiré, prophète (notamment chez Dorat et Nouvelet), porte-parole de Dieu, ou chantre de la communauté fervente, l’hymnode transfigure la victoire en la soumettant au nombre poétique. L’« heure triomphale » célébrée dans l’hymne rassemble ainsi en elle trois circonstances essentielles : le moment historique de la victoire militaire, le moment anhistorique de l’intervention divine et, synthétisant solennellement ces deux moments, le présent lyrique du chant de louange [37].
L’hymne de victoire catholique illustre parfaitement l’importance de la mission attribuée, à la Renaissance, à la poésie de circonstance. En s’emparant de l’« heure triomphale », le poète ne se contente pas de transformer une circonstance historique en véritable signe, de fixer un événement pour l’inscrire dans une mémoire collective, il cherche à donner des troubles religieux, succession désordonnée d’événements isolés, une lecture complète et cohérente, articulée poétiquement – à l’aide du mythe – à l’idéologie monarchique. Certes, la manière de célébrer la victoire et de peindre le vainqueur évolue dans le siècle : en perdant peu à peu sa dimension miraculeuse, l’« heure triomphale » est davantage associée à l’éthique prudente et héroïque du vainqueur, comme chez Claude Expilly. On notera aussi de profondes différences entre l’hymne de victoire catholique et le cantique de victoire protestant, ce dernier apparaissant surtout comme le chant de résistance de tout un peuple guidé par la foi et l’espérance, mené par un vainqueur divinement élu moins en raison d’un principe théologico-politique de droit divin que par un principe éthique de soumission spirituelle. Fruit d’un mélange des deux esthétiques, le Henri IV de Du Bartas, héros de l’unité retrouvée dans le Cantique de la victoire obtenue par le roi à Ivry (1590) constitue en ce sens une synthèse parfaite d’humilité et d’héroïsme. Mais, catholique ou protestant, le chant triomphal illustre surtout les ambitions d’un poète ; ce que confirme assurément la célébration de la victoire, c’est l’éternel triomphe de la poésie.
Corpus étudié (sont indiquées après le titre la victoire célébrée et la forme poétique adoptée)
1568 – Amboise (François d’), Hymne triumphal au Roy sur la victoire nouvellement conquise sur les rebelles et conjurez, Paris, D. Du Pré, 1568 (Saint-Denis, 10 novembre 1567 – 24 sizains hétérométriques : 10-10-6-10-10-6 / ffmf2f2m).
1569 – Ronsard, Chant triomphal pour jouer sur la lyre. Sur l’insigne victoire qu’il a pleu à Dieu donner à Monseigneur, Frere du Roy, J. Dallier, 1569 [in Sixiesme livre des Poëmes] (Jarnac, 15 mars 1569 – 18 sizains hétérométriques : 7-3-7-7-3-7 / mmfm2m2f) – rebaptisée en 1578 Hynne du Roy Henri IIIe, Roy de France, pour la victoire de Moncontour (sic), avec quelques variantes.
1569 – Dorléans (Louis), Cantique de victoire, par lequel on peut remarquer la vengeance, que Dieu a prise dessus ceux qui vouloient ruyner son Eglise & la France, Paris, R. Le Mangnier, 1569 (Jarnac – 46 sizains d’alexandrins : mmfm2m2f).
1569 – Jamyn (Amadis), Ode, sur la bataille de Jarnac, M. Patisson [in Les Œuvres poetiques, 1575] (Jarnac – 11 sizains hétérométriques : 10-10-6-10-10-6 / ffmf2f2m).
1569 – Dorat (Jean), Paean ou chant triumphal sur la victoire de Charles Neuviesme Roy de France, & le Poëte chantent par refrain [in Paeanes sive Hymni, Paris, J. Charron, 1569] (Moncontour, 3 octobre 1569 – 23 couplets de 4 alexandrins, dont le refrain « Trois Io, trois Pæans à Charles le vainqueur », la première rime étant reprise à chaque couplet : fmmf).
1569 – Dorat (Jean), Paean ou hymne de victoire [ibidem] (Moncontour – 140 alexandrins à rimes plates).
1569 – Ronsard, L’Hydre deffaict ou la louange de Monseigneur le duc d’Anjou, Frere du Roy [ibidem] (Moncontour – 204 décasyllabes à rimes plates).
1569 – Jamyn (Amadis), Cantique de la victoire de Monseigneur le duc d’Anjou, Frere du Roy [ibidem] (Moncontour – 17 sizains de décasyllabes : mfmfm2m2).
1569 – Belleau (Rémi), Chant de triomphe sur la victoire en la bataille de Moncontour [ibidem](Moncontour – 47 huitains d’heptsyllabes : fmfmf2m2f2m2).
1569 – Baïf, Ode au Roy, sur la victoire gaignée contre les rebelles par l’armée de sa Majesté, sous la conduicte de Monseigneur le duc d’Anjou fils & frere du Roy [ibidem] (Moncontour – 14 sizains d’octosyllabes : fmfmf2 f2).
1570 – Robin du Faux (Pascal), Nicodie, ou Hymne de Victoire, à […] Henry de Vallois, duc d’Anjou […] contre les Huguenots rebelles, Angers, R. Piquenot, 1570 (Jarnac / 500 décasyllabes à rimes plates).
1572 – Nouvelet (Claude Etienne), Hymne trionfal au Roy sus l’equitable justice que Sa Majesté fait des rebelles la veille et jour de Sainct Loys, Paris, R. Granjon, 1572 (Saint-Barthélemy, 24 août 1572 – 4 triades : tour de 18 octosyllabes / ffmf2f2mf3m2f3m2f4f4m3m3f5m4f5m4, retour identique et pause de 14 heptasyllabes / fmfmf2f2m2m2f3f3m3f4f4m3).
1572 – [Anonyme], Hymne du tres-chrestien roy Charles IX, Lyon, B. Rigaud, 1572 (Saint-Barthélemy – 162 alexandrins à rimes plates).
1588 – Billard de Courgenay (Claude), Hymne de victoire sur les deffaites, et la reddition des reytres, Paris, F. Le Mangnier, 1588 (Vimory, 26 octobre 1587 et Auneau, 24 novembre 1587 : victoires du duc de Guise contre les réîtres suisses et allemands – 604 alexandrins à rimes plates).
1596 – Expilly (Claude), Hymne sur la bataille de Pont-Charra, gaignee par Messire François de Bone Seigneur de Lesdiguieres le 18 septembre 1591, in Les Poemes du Sieur d’Expilly, Paris, A. L’Angelier, 1596 (Pontcharra, 18 septembre 1591 : victoire des Politiques contre la Ligue – 176 alexandrins à rimes plates).
1596 – Expilly (Claude), Hymne sur la journee de Salbertrand, A Monsieur de Callignon Seigneur de Voreppe & de Périns, Conseiller du Roy en ses Conseils Privé et d’Estat, & Chancelier de Navarre (bataille de Salbertrand – 162 alexandrins à rimes plates).
Nota : il n’existe pas d’édition moderne des poèmes de L. Dorléans, P. Robin du Faux, Cl.-E. Nouvelet, Cl. Billard et Cl. Expilly ; pour les autres textes, voir : François d’Amboise, Œuvres complètes. I. 1568-1584, éd. D. Ughetti, Napoli, Edizioni Scientifiche Italiane, 1973, p. 29-34 ; Ronsard, Œuvres complètes, éd. J. Céard, D. Ménager et M. Simonin, Paris, Gallimard, Bibl. de la Pléiade, 1993-4, II, p. 512-515 (Chant triomphal) et p. 1073-1078 (L’Hydre desfaict) ; Baïf, Œuvres complètes, I, éd. J. Vignes, Paris, Champion, 2002, p. 483-485 ; Amadis Jamyn, Les œuvres poétiques. Premières poésies et livre premier, éd. S. M. Carrington, Genève, Droz, 1973, p. 67-72 (Cantique) et p. 210-213 (Ode) ; Jean Dorat, Œuvres poétiques, éd. Ch. Marty-Laveaux, Genève, Slatkine Reprints, 1974, p. 32-35 (Chant triumphal) et p. 35-39 (Hymne de victoire) ; Rémi Belleau, Les Œuvres poétiques, III, éd. G. Demerson, Paris, Champion, 1998, p. 123-135 (notice et notes F. M. Verdier).