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Alice FOLCO

Université Stendhal-Grenoble III – Traverses 19-21

Portrait de Stéphane Mallarmé en spectateur

L’auteur

Alice Folco est maître de conférences en arts du spectacle à l’université Stendhal-Grenoble 3, et membre de la composante CINESTHÉA du groupe de recherches TRAVERSES 19-21. En 2006, elle a soutenu une thèse de doctorat, dirigée par Jean-Pierre Sarrazac et intitulée Dramaturgie de Mallarmé, à l’Institut d’Études Théâtrales de l’université Paris 3. En 2010, elle a publié aux Presses Universitaires de France, La Mise en scène théâtrale de 1800 à nos jours, en collaboration avec Bénédicte Boisson (Rennes 2) et Ariane Martinez (Grenoble 3). Ses travaux portent sur les proses de Stéphane Mallarmé consacrées au théâtre, et, plus récemment, sur l’histoire de la mise en scène à la fin du XIXe siècle. Parmi les derniers articles parus : « Au carrefour naturalo-symboliste : Zola / Mallarmé », Le Passage du témoin (hommage à Jean-Pierre Sarrazac), J. Danan et D. Lescot (dir.), Études théâtrales, n° 56, Louvain, 2013.


Texte complet


On le sait, il l’a beaucoup dit lui-même, Stéphane Mallarmé n’aimait pas particulièrement aller au théâtre, et il s’y est beaucoup ennuyé. Alors qu’il fréquentait volontiers, et assidûment, les lieux de concert, la liste des pièces auxquelles il a assisté que l’on peut établir à partir de ses biographies et de sa correspondance est particulièrement brève – et ce y compris dans la décennie 1890, au cours de laquelle on vit fleurir les « théâtres à côté », ces petites structures indépendantes qui tentaient de promouvoir un répertoire neuf, et dans certains cas, résolument symboliste.

Les « Notes sur le théâtre » parues entre novembre 1886 et juillet 1887 dans La Revue indépendante constituent ainsi un observatoire exceptionnel des relations empiriques qu’entretenait le penseur du « théâtre de la nature » avec la société des spectacles de son temps. Non seulement la fonction de critique astreignait le poète à une forme d’assiduité inusitée, mais celui-ci s’adonnait à une lecture du théâtre entendu dans l’acception la plus extensive du mot (le texte dramatique, la représentation, l’édifice accueillant des spectateurs et même l’institution participant à la vie de la cité). L’historien dispose donc d’un matériau critique qui couvre une saison complète, en prise directe avec l’actualité théâtrale dans ce qu’elle peut parfois avoir de plus anecdotique (les productions immémorées d’une industrie des spectacles alors florissante, l’annulation de Lohengrin, ou encore, sur un mode plus dramatique, l’incendie meurtrier de l’Opéra Comique). De surcroît, cette saison est particulièrement intéressante pour considérer les échos que les théories mallarméennes peuvent entretenir avec les profondes réformes des pratiques scéniques initiées par les avant-gardes au tournant du siècle. Mallarmé fait en effet partie (aux côtés d’Edmond de Goncourt, Émile Zola, Alphonse Daudet, François Coppée, Théodore de Banville, ou encore Henry Becque [1]), des premiers soutiens du Théâtre Libre, dont la fondation en mars 1887, par André Antoine, constitue une césure symbolique dans l’histoire du théâtre moderne et une étape décisive de la reconnaissance de la dimension artistique de la mise en scène [2].

Cette contribution se propose donc d’esquisser un portrait de Mallarmé en spectateur, à partir des Notes sur le théâtre parues dans La Revue indépendante (c’est-à-dire avant les remaniements effectués pour Crayonné au théâtre), en prenant pour fil directeur la réconciliation entre théâtre et littérature, qui est un des fondements du « théâtre d’art [3] », et qui sera ici envisagée ici à travers trois motifs spécifiquement mallarméens : la défense des auteurs, l’herméneutique du spectacle et le modèle paradoxal de la lecture.

La défense des écrivains

La sélection opérée dans l’offre très large des pièces de théâtre programmées pendant la saison théâtrale 1886-1887 est, à elle seule, significative des orientations mallarméennes [4]. Sans surprise, on constate que le chroniqueur fréquente essentiellement les scènes dites « littéraires » que sont la Comédie-Française et l’Odéon, où il voit huit spectacles en tout (Hamlet, d’Alexandre Dumas et Paul Meurice d’après Shakespeare, Les Honnêtes Femmes d’Henry Becque, Monsieur Scapin de Jean Richepin, Francillon d’Alexandre Dumas, Renée Mauperin d’Henri Céard d’après les Goncourt, Numa Roumestan d’Alphonse Daudet, Michel Pauper d’Henry Becque, et enfin Le Lion Amoureux de François Ponsard). Et, si l’on excepte le Crocodile de Victorien Sardou à la Porte Saint Martin, et Gotte d’Henri Meilhac au Palais-Royal, il semble n’avoir pris la peine de se déplacer dans un théâtre des boulevards que lorsqu’un grand nom de la littérature, le plus souvent un romancier, d’ailleurs, est à l’affiche. Émile Zola au premier chef : Mallarmé assiste à la création de Renée au Vaudeville ; à celle du Ventre de Paris, adapté par William Busnach, au Théâtre de Paris ; et enfin à Jacques Damour, adapté par Léon Hennique, qui inaugure la toute première soirée du Théâtre Libre. Mais on voit aussi apparaître des grands noms du premier XIXe siècle, avec La Tour de Nesle (drame d’Alexandre Dumas et Frédéric Gaillardet, créé en 1832 et repris à la Porte Saint-Martin), ou les Mystères de Paris (d’Ernest Blum d’après Eugène Sue, à l’Ambigu). Autre roman adapté, La Comtesse Sarah de Georges Ohnet, au Gymnase, semble avoir été une expérience particulièrement accablante puisque le chroniqueur, habituellement assez habile pour trouver un trait mineur à souligner même dans des « occasions moyennes [5] », avoue son incapacité à en dire quoi ce soit. On peut ajouter, d’une part, qu’à l’exception de la pièce de Meilhac au Palais Royal, le critique semble avoir strictement évité les comédies et les vaudevilles (par exemple, la première de Tailleur pour Dame de Georges Feydeau à la Renaissance) ; et, d’autre part, qu’il mentionne à deux reprises des textes qu’il a seulement lus (la pantomime, Pierrot assassin de sa femme, parue en 1882, de Paul Margueritte, et Le Forgeron, scènes héroïques, de Théodore de Banville, qui vient de paraître).

Dans ce panorama dramatique, la surreprésentation des auteurs réalistes est manifeste. Pour un Shakespeare et deux pièces versifiées (Monsieur Scapin de Jean Richepin, Le Forgeron de Banville), on trouve trois textes de Zola, deux de Becque, deux des Goncourt [6], un de Daudet. Bien entendu, cette forte présence reflète la production spécifique de l’année, et ce déséquilibre sera corrigé lors de l’édition de Crayonné au théâtre, grâce à l’adjonction de textes de 1893 portant sur le théâtre d’Édouard Dujardin et de Maurice Maeterlinck, ou encore sur un recueil d’Henri de Régnier. Néanmoins, malgré des orientations thématiques ou stylistiques a priori assez éloignées des préoccupations mallarméennes, les œuvres de ces auteurs sont traitées de manière systématiquement bienveillante. Concernant Henry Becque, par exemple, Mallarmé trouve absurde qu’on reproche à une de ses pièces de jeunesse, Michel Pauper, de ne pas être novatrice selon les canons de 1887, alors qu’elle date de 1870. Selon lui, la reconnaissance fort tardive dont jouit enfin Becque lui donne droit à « un retard de curiosité [7] » bien mérité, et surtout, sa pièce constitue « un aboutissement imprévu, glorieux et dernier de l’ancien genre classique, en pleine modernité [8] ». Aussi distingue-t-il soigneusement l’écriture de ce dernier de « tout le théâtre faussé par une thèse ou aveuli jusqu’à l’étalage de chromolithographies [9] », qui domine le boulevard [10].

Plus généralement, même si les goûts du critique le portent visiblement plutôt vers les pièces versifiées, il considère de manière très positive cette intervention massive des romanciers dans la sphère théâtrale, et y voit une manifestation du désir de « littérature et de vie » de « se déverser à la rampe [11] ». Le chroniqueur semble particulièrement intéressé par ce qui se passe lorsqu’un écrivain s’occupe de théâtre, quel que soit son genre de prédilection, ou sa « chapelle » littéraire. Les auteurs sont ainsi opposés aux « faiseur[s] [12] » – ces dramaturges de métier, qu’on appelait aussi à l’époque « carcassiers », parce que la seule chose qu’on attendait d’eux étaient qu’ils produisent à la chaine des pièces aux intrigues bien ficelées. À propos de Renée, adaptée de La Curée, Mallarmé signale que « l’adaptation par le romancier seul d’un tôme [sic] de son œuvre » a permis d’améliorer le « théâtre dit de genre » : voile, mensonge, fausseté disparaissent, et « avec une nudité bien d’allure dans la franchise classique se montrent des caractères [13] ». Là où la plupart des critiques insistent sur la dimension mélodramatique des adaptations de Zola [14], Mallarmé, au contraire, survalorise son implication : ainsi, dans le cas du Ventre de Paris, le « voisinage » de Zola a-t-il aidé « l’homme d’un métier notoire » qu’est Busnach à devenir « tout à coup un peu un novateur [15] ». De la même manière, le simple fait qu’Alphonse Daudet ait été son propre adaptateur pour Numa Roumestan mérite tout un développement, et prend une importance symbolique capitale, comme si la perception de la pièce changeait du tout au tout du simple fait que Daudet n’ait pas utilisé les services d’un dramaturge de métier [16].

Si Mallarmé se montre solidaire des écrivains contemporains, il devient, en revanche, beaucoup moins indulgent lorsqu’il dénonce la faillite des « officiels lieux de fiction [17] » censés promouvoir la littérature dramatique. Dans la critique mallarméenne, la « suprême, presque ingénue et la plus solitaire des protestations [18] » qu’est le bâillement, n’est pas tant une réaction à la qualité des œuvres qu’à l’incurie des institutions ayant choisi de les programmer. La reprise du Lion Amoureux de Ponsard, au théâtre de l’Odéon, est ainsi l’occasion d’une diatribe sur la faillite de l’État en matière de ce que nommons aujourd’hui la « politique culturelle ». Le critique avoue ne plus savoir « qui d’abord abominer » : « l’intrus qui apporte sa marchandise différente de l’extase et du faste », ou « le vain prêtre qui endosse une vacance d’insignes pour néanmoins officier [19] ». L’intrus n’est pas désigné nommément, mais le lecteur se souvient certainement qu’il vient de lire quelques paragraphes plus haut que : « M. Sardou à qui l’on sait une dextérité grande, est l’homme qui souvent me paraît, plus qu’aucun, offusquer de l’opacité vaine de ses fantoches la lumière éparse comme une frémissante pensée à l’ascension du rideau [20] ». Pire que le théâtre commercial, il y a donc le théâtre académique : pire que Sardou, il y a… Ponsard ; celui qui eut l’« effronterie, inouïe, hasardée, extravagante et presque belle », de persuader « à une clique qu’il représentait, dans le manque de tout autre éclat, au théâtre la Poésie, quand en resplendissait le dieu [21] », c’est-à-dire Hugo. La critique ne porte pas donc sur la dramaturgie de celui dont le succès est censé marquer symboliquement le déclin du romantisme au théâtre, mais sur les choix de programmation du Théâtre de l’Odéon, ce « temple d’un culte factice », qui prétend « instaurer cette déité [i.e. la littérature] dans un appareil balourd et vulgaire [22] ». À tout prendre, il est moins grave de « prendre le théâtre et exclure la Poésie », comme le font, sur les Boulevards, les dramaturges du « fait-divers » et du « trompe-l’œil », que de trahir la mission du théâtre subventionné en montrant la littérature « en tant que je ne sais quoi de spécial au bâillement [23] ».

Symptomatiquement, la dernière des critiques de La Revue indépendante se conclut par le rappel de ce triomphe navrant de l’académisme. Pour bien signifier que l’État faillit à sa mission de promotion de la littérature, « l’engrenage théâtral » est comparé aux « salons annuels de Peinture et de Sculpture », et le poète constate, une fois de plus, que « l’institution vacante » a préféré construire un « simulacre approprié au besoin immédiat, ou l’art officiel qu’on peut aussi appeler vulgaire » » et en appeler à « tous les cultes artificiel et poncifs », plutôt que de répondre aux besoins de la « multitude [24] ». Face à une telle carence des scènes académiques, on comprend que Mallarmé ait soutenu les débuts du modeste Théâtre Libre, surtout si l’on se souvient que l’Hérodiade avait été retoquée par le comité de lecture du Théâtre-Français, en 1865, parce qu’elle était trop « poétique » et pas assez « jouable [25] », pour reprendre les mots de Théodore de Banville. En effet, en mars 1887, le projet d’Antoine n’est ni d’« inventer » la mise en scène moderne, ni même de créer une scène consacrée au naturalisme – même si c’est ce qu’elle est progressivement devenue – mais bien de lutter contre « les difficultés extrêmes qu’éprouvent les auteurs dramatiques en général, et les débutants en particulier, à trouver un théâtre pour présenter leurs œuvres au public [26] », c’est-à-dire d’offrir une tribune littéraire à tous ceux qui ne respectent pas les normes prétendument intangibles de la « pièce bien faite », chère à Francisque Sarcey comme aux directeurs des théâtres.

Une herméneutique singulière du théâtre

La démarche mallarméenne s’inscrit ainsi dans un large mouvement de promotion des auteurs au théâtre, qui transcendance les écoles littéraires, et qui à bien des égards pose des questions qui deviendront prégnantes au XXe siècle sur le rôle et la fonction du théâtre public. De ce point de vue, l’originalité de sa démarche vient peut-être moins de cette défense et illustrations des écrivains du « carrefour naturalo-symboliste [27] », pour reprendre l’expression de Jean-Pierre Sarrazac, que de son approche critique singulière. Si l’on compare le type de grille de lecture mis en œuvre dans les « Notes sur le théâtre » de La Revue indépendante – puis plus tard dans le National Observer (1892-1893) – avec les pratiques dominantes de la critique dramatique de la fin du XIXe siècle, on ne peut que constater, au-delà des questions de style, l’originalité d’une herméneutique globale qui prend en considération des éléments souvent ignorés par ailleurs [28].

À l’évidence, Mallarmé n’est ni un spectateur ni un critique comme les autres. Ainsi, on serait bien en peine de trouver dans les chroniques une quelconque marque d’intérêt pour les intrigues des pièces : le critique ne propose qu’une version synthétique de la fable, le plus souvent résumée en une phrase, ou une formule abstraite. Ce trait est d’autant plus singulier que la paraphrase détaillée de l’intrigue est le passage obligé (et parfois le point d’aboutissement) de tout feuilleton dramatique digne de ce nom au XIXe siècle. Or comme Mallarmé le suggère, très justement, à propos du Forgeron, réduire une pièce à son intrigue, c’est oublier que la qualité d’un texte vient avant tout de son style : il en dira donc l’argument « en le moins de mots à côté, vu que les mots sont la substance même employée ici à l’œuvre d’art [29] ».

Pour tout dire, on sent surtout que ce qui l’intéresse n’est, de toute façon, pas le déroulement de l’histoire. Parfois l’accent est mis sur l’analyse formelle des pièces, comme dans le cas de Gotte, de Meilhac ; on ne saura jamais ce dont parle la pièce, mais Mallarmé décèle dans sa construction quelque chose qui lui rappelle la danse : le « rythmique équilibre dans la structure » et l’« opposition de scènes contrastées et retournées » sont décrits comme « une voltige, allées, venues, en maint sens, de la fée littéraire unique, la Fantaisie [30] […] ». Mais le plus souvent, c’est la signification implicite de l’œuvre qui est mise en avant ; et c’est en ce sens qu’on peut dire que Mallarmé pratique une véritable herméneutique du théâtre : il s’agit de traiter la pièce comme une parabole dont il faut élucider le sens caché. Hamlet raconte ainsi « l’antagonisme de rêves chez l’homme avec les fatalités à son existence départies par le malheur [31] ». Une des scènes des Honnêtes Femmes, autre exemple, est décrite comme une « allégorie bourgeoise, délicieuse et vraie [32] », etc.

En ce qui concerne les personnages, on peut faire le même type de remarques. Loin de traiter les héros comme des personnes réelles, en spéculant de manière approfondie sur leur psychologie, comme le font la plupart des critiques, Mallarmé ne s’intéresse qu’au mythe sous-jacent au personnage fictif. Hamlet est ainsi « un imaginaire héros, à demi mêlé à de l’abstraction », Ophélie est « la vierge enfance objectivée du lamentable héritier royal », Polonius une « figure comme découpée dans l’usure d’une tapisserie […] [33] »… L’image de la tapisserie est révélatrice du manque d’intérêt pour ce qu’on appelle habituellement « l’épaisseur », ou le « relief » du personnage ; elle est d’ailleurs reprise en 1893, dans le texte consacré à Maeterlinck, où les personnages sont comparés à des « hôtes déteints », qui bientôt deviendront « des trous » sur des « tentures vieillies [34] ». Ainsi les vers de Banville sont-ils vantés parce qu’ils sont efficaces au point de « simuler peu à peu et d’incarner les héros eux-mêmes (juste dans ce qu’il en faut apercevoir pour n’être pas gênés de leur présence, bref le mouvement […]) [35] ». On le sent bien, les dramaturgies que Mallarmé apprécie le plus sont clairement celles où les personnages lui apparaissent comme « d’essentielles figures [36] », des silhouettes incarnant des idées.

Tout l’intérêt d’un spectacle se mesure donc à la façon dont il laisse deviner un arrière-plan symbolique, comme Mallarmé l’écrit, en 1886, à propos d’un ballet décevant : « rien n’a lieu, sauf la perfection des exécutants, qui vaille un instant d’arrière-exercice du regard, rien… Fastidieux que mettre le doigt sur l’inanité quelconque issue d’un gracieux motif premier [37] ». À contretemps du désir de rythme et de spectaculaire qui règne sur les Boulevards de la Belle Époque, le chroniqueur amateur rêve d’un théâtre qui, en n’enfermant pas l’imagination des spectateurs dans un univers trop précis, ne rabaisserait pas le mythe au rang de faits-divers.

On le voit, Mallarmé se singularise jusque dans son ennui. Dès 1874, une de chroniques de La Dernière Mode comparait l’enfermement dans une salle de spectacle à un mauvais rêve :

Un livre est tôt fermé, fastidieux […]. Quelle inévitable traîtrise, au contraire, dans le fait d’une soirée de notre existence perdue en cet antre du carton et de la toile peinte, ou du génie : un Théâtre ! si rien ne vaut que nous y prenions intérêt. Pas de nues dont l’on puisse s’environner, sous la lumière réelle du gaz, autres que la robe de tissus vaporeux, froissée dans l’impatience. Vaines, splendides, incompréhensibles, de vivantes marionnettes devant nous proclament à haute voix leur sottise, sur un fond d’ennui intense et exaspéré ; et qui fait d’elles comme les acteurs d’un cauchemar spécial, très rare, heureusement. Rien, le Décor, paysage du nord ou du midi, intérieur de palais grandiose, prendra toujours quelque chose de notre attention, par cela seul qu’il évoque ces sites [38].

Comme le formulait très justement Roland Barthes, le théâtre a, en effet, la particularité de générer un « ennui superlatif », en raison de « son caractère essentiel qui est précisément l’angoisse de son infini [39] ». Mais dès ses premiers écrits, le poète distingue bien deux types d’œuvres : celles qui provoquent chez lui le cauchemar du trop plein, et celles qui sont suffisamment floues pour offrir une part de vide propice à la divagation. L’ennui prend donc chez lui une coloration positive inattendue, et devient une condition de déclenchement de la rêverie (condition nécessaire, mais non suffisante – faut-il le préciser). Dans le bref dialogue fictif paru dans les Notes sur le théâtre d’avril, et qui, non sans provocation, ouvre Crayonné au théâtre, Stéphane Mallarmé fait ainsi dire à « l’exquise dame anormale » qui l’a accompagné au spectacle : « Mais c’est très bien, c’est parfait – à quoi semblez-vous prétendre encore, mon ami ? […] Allons-nous en (signifie-t-elle) cependant – on ne s’ennuierait même pas et je craindrais de ne pouvoir rêver autre chose [40] ». L’exaspération naît ici de la passivité à laquelle l’activité frénétique du plateau condamne l’esprit, qui ne peut errer à sa guise (battre le tréteau de « sa seule voltige [41] »). La « pire torture », en effet, est de « ne pouvoir que trouver très bien et pas même abominer ce au-devant de quoi l’on vint et se fourvoya [42] ! », parce que l’on est conscient que ce type de spectacle est totalement inadapté à la soif de mythe qui anime la nation. À tout prendre, mieux vaut donc s’ennuyer librement que subir la fascination médiocre des fictions qui envahissent les scènes…

Le modèle de la lecture privée

Tout l’enjeu sera d’inventer pour le théâtre un équivalent de la marge du Livre, une part de blanc qui permette de laisser résonner les possibles d’un texte, et de projeter sur scène sa propre « vision libre [43] ». On le sait, les concerts, la danse, et même les feux de cheminée, ont pu servir de modèle pour penser la rénovation du théâtre : dans le cadre restreint de cette contribution nous évoquerons seulement pour conclure le modèle fourni par la pratique de la lecture privée, lecture intime.
Il est assez facile de faire de Mallarmé le défenseur par excellence de la lecture contre la représentation, dès lors que le chroniqueur de La Revue Indépendante explique à plusieurs reprises que le fait d’avoir vu représenter des textes qu’il avait déjà lus ne lui a pas apporté grand-chose. En décembre 1886, il dit faire « peu de différence […] entre l’admiration que garde depuis plusieurs années ma mémoire d’une lecture de la comédie de M. Becque, les Honnêtes Femmes, et le plaisir tiré de sa reprise hier [44] ». À propos de Renée Mauperin, il évoque le « déplaisir d’un visage exact penché, hors de la rampe, sur ma source de rêverie », puis il explique que « l’idéal résultat » produit par le roman « s’effarouche de la réalité même de Mlle Cerny », et, enfin, conclut qu’il faut aller la voir « en tant que public, à l’Odéon, si l’on n’aime rouvrir, comme [lui], chaque hiver, un des plus exquis et poignants ouvrages de MM. de Goncourt [45] ». Pour le dire plus abruptement : si l’on n’aime pas lire, on peut tout à fait aller voir le spectacle.

Cela étant dit, lorsque l’on parcourt les textes d’éminents critiques qui furent ses contemporains, et que l’on ne peut guère accuser d’être acquis à la cause symboliste, il apparaît que le fait de réserver certains textes à la seule lecture est un point de vue plus répandu qu’on ne l’imagine aujourd’hui. Hamlet, par exemple, a été repris deux fois en 1886, une fois à la Porte Saint-Martin, avec Sarah Bernhardt dans le rôle titre, et un peu plus tard à la Comédie-Française, avec cette fois Mounet-Sully. Nombreux furent les chroniqueurs qui, comme Francisque Sarcey, affirmèrent que la pièce était injouable – non pas en raison de la multiplicité des lieux, mais parce que le personnage était trop inintelligible pour passer la rampe [46]. Dans La Revue de deux mondes, Louis Ganderax, par exemple, explique pourquoi les « directeurs doivent respecter Hamlet, c’est-à-dire n’y pas toucher [47] » : « Il y a plus de choses dans l’âme d’Hamlet que notre psychologie n’en saura jamais rêver [48]. » Et après avoir dit qu’il faudrait une éternité à un Dieu pour démêler « la merveilleuse complexité de cette âme », il conclut : « Mais de l’éternité au temps d’un spectacle il y a quelque différence. […] Adieu le sens caché, le sens multiple et fuyant, que je poursuivrais, si j’étais chez moi [49] […] ». Entre parenthèse, on voit que l’ordre des valeurs s’est totalement inversé : aujourd’hui on monte surtout les textes qui étaient considérés au XIXe siècle comme injouables parce qu’ils offraient trop d’interprétations possibles, comme Hamlet, ou La Cerisaie, qui sont appréciés désormais précisément en raison de la grande marge de manœuvre qu’ils permettent aux metteurs en scène…

À aucun moment, Mallarmé n’écrit que l’on aurait dû s’abstenir de jouer Hamlet : le chef d’œuvre de Shakespeare « s’accommode de la mise en scène dernière de ce temps, ou s’en passe, avec indifférence [50] ». Et il n’écrit pas non plus, comme Maeterlinck le fera en 1890, que « quelque chose d’Hamlet est mort pour nous » une fois que nous l’avons vu sur une scène de théâtre, ou encore que « le spectre d’un acteur l’a détrôné, et [que] nous ne pouvons plus écarter l’usurpateur de nos rêves [51] ». Pour Mallarmé, le passage à la scène est indifférent, il n’est pas « mortifère ». Et il n’est pas anodin qu’il ait choisi de clôturer Crayonné au théâtre avec Le Forgeron de Banville, œuvre qui se prêterait tout à fait au « déploiement visible et [à] l’interprétation » si les « conditions » étaient réunies [52].

Paradoxalement, le renoncement mallarméen, parce qu’il n’est que provisoire, apparaît donc moins grand que celui des tenants du système dominant, qui pensent qu’un texte qui résiste en partie à la compréhension immédiate est incompatible dans l’absolu avec les lois de la scène. Le fait que les salles de spectacles aient été clairement le lieu des occasions manquées « d’initiation et de joie [53] » rend ainsi plus remarquable encore son choix de ne pas exclure le principe du passage à la scène des grands textes dramatiques.

La promotion de la lecture ne se fait donc pas dans le rejet de la représentation, mais dans le fait qu’elle puisse constituer un modèle d’expérience esthétique. En préambule à la critique des Honnêtes Femmes, on peut, en effet, lire cette phrase capitale : « À la rigueur un livre suffit pour évoquer toute pièce : aidé de sa personnalité multiple chacun pouvant se la jouer en dedans, ce qui n’est pas le cas quand il s’agit de pirouettes [54]. » De cet axiome, on peut tirer deux conclusions : soit on décide que, effectivement, le théâtre doit céder sa place à « l’être aux ailes de gaze initial, à qui sont les planches [55] », à la danseuse, donc – soit il convient de trouver une nouvelle manière de procéder pour que la mise en scène ne soit pas une duplication fade, voire ratée, du texte. Comme l’énoncera éloquemment Pierre Quillard, en 1891, dans un texte intitulé « De l’inutilité de la mise en scène exacte », rédigé pour défendre les partis pris scéniques de sa mise en scène de La Fille aux mains coupées, au Théâtre d’Art de Paul Fort, la puissance du langage poétique proféré, en suggérant aisément aux « spectateurs complices » des « architectures de rêve », rend la vraisemblance scénique inutile : « La parole crée le décor comme le reste [56]. »

Si, finalement, n’importe quel lecteur est capable de générer, tout seul, dans son esprit, les paysages et même les personnages, l’intérêt de passage à la scène n’est à chercher ni dans la figuration des lieux de l’action par de la toile peinte, ni même dans l’incarnation des héros par des acteurs. De ce point de vue, on note que le seul acteur dont le travail est apprécié dans les Notes sur le théâtre, Mounet-Sully, est comparé à un « scoliaste [57] », et à un « lettré [58] », qui a su « [élucider] [59] » Hamlet. Son jeu, contrairement à celui des autres comédiens de la Comédie-Française, a évité un double écueil : incarner de manière vraisemblable des personnages qui sont « à demi mêlé[s] à de l’abstraction » ; vouloir « bien jouer » mais sans « comprendre [60] », et donc faire des contresens. Autrement dit, ce n’est pas en donnant trop de relief aux personnages que l’on peut remplacer la lecture et légitimer la représentation, mais bien en signalant leur dimension allégorique… D’une certaine manière, la seule chose que la scène peut apporter, c’est une meilleure compréhension des enjeux symboliques de l’intrigue, grâce à une traduction sensible des enjeux intimes de la pièce : Mounet-Sully est un « souverain plastique et mental de l’art », il est à la fois un « mime » et un « penseur [61] ». La représentation n’a donc d’intérêt que dans la mesure où elle peut aider ceux qui ne savent ni déchiffrer directement le théâtre de la nature (« ceux n’ayant pas à voir les choses à même ! de la pièce écrite au folio du ciel et mimée par le geste des passions, par l’Homme [62] »), ni, plus modestement, décrypter la signification des œuvres littéraires – autrement dit si elle adopte elle-même un fonctionnement herméneutique.

Pour prolonger cette mise en contexte des critiques mallarméennes dans l’histoire des spectacles, on peut signaler, a contrario de la tradition qui a longtemps fait de Mallarmé un chantre du théâtre mental, un poète coupé de la réalité des pratiques scéniques, que cette intuition (la représentation n’a d’intérêt que si elle révèle le sens profond du texte) fait écho de manière très forte aux discours des premiers metteurs en scène modernes, qui se posaient en lecteurs privilégiés et qui prétendaient faire œuvre en se mettant au service des auteurs. Comme le disait Antoine, dans la Causerie sur la mise en scène de 1903, la mise en scène comporte à la fois une dimension « matérielle » (« la constitution du décor servant de milieu à l’action, le dessin et le groupement des personnages »), et une « dimension immatérielle, c’est-à-dire l’interprétation et le mouvement du dialogue [63] ». Mais on pourrait aussi citer le Manifeste pour la création du Vieux Colombier de Jacques Copeau, qui écrivait, en 1913 : « Toute l’originalité de notre interprétation, si on lui en trouve, ne viendra que d’une connaissance approfondie des textes [64] ».

Notes

[1Le Théâtre Libre, brochure de 1887, Imprimerie ve Ethiou Pérou & Fils, p. 5.

[2Sur ce point, on pourra se reporter notamment à Bénédicte Boisson, Alice Folco, Ariane Martinez, La Mise en scène théâtrale de 1800 à nos jours, Paris, PUF, coll. « Licence », 2010.

[3Voir Jean-François Dusigne, Du théâtre d’art à l’art du théâtre, anthologie de textes fondateurs, Paris, Éditions théâtrales, 1997.

[4Nous laissons de côté pour cette étude les spectacles de danse.

[5L’expression est employée, dans la « Bibliographie » des Divagations, à propos des écrits critiques de Catulle Mendes, qui était « capable de se produire quotidiennement magnifique envers des occasions moyennes », Œuvres complètes, éd. Bertrand Marchal, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2003, t. 2, p. 275.

[6Le critique profite de l’adaptation de Renée Mauperin pour évoquer le roman Chérie, qu’Edmond de Goncourt a publié chez Charpentier en 1884.

[7La Revue indépendante, n° 4, février 1887, fac-similé, Genève, Slatkine reprints, 1970, t. 2, p. 197.

[8Ibid., p. 196.

[9Idem.

[10Il explique, par exemple, que sa pièce, Les Honnêtes Femmes, est un « acte parfait dans une autre manière », en raison de « sa puissante touche de poésie inévitable […] ; et (je souris) du fait du symbole », La Revue indépendante, n° 2, décembre 1886, op. cit., t. 1, p. 247.

[11La Revue indépendante, n° 9, juillet 1887, op. cit., t. 4, p. 59.

[12L’expression désigne Victorien Sardou, et est employée dans les Gossips de L’Athenaeum, Œuvres complètes, op. cit., t. 2, p. 428.

[13La Revue indépendante, n° 7, mai 1887, op. cit., t. 3, p. 246.

[14Voir par exemple, les analyses de Camille Le Senne, critique au Télégraphe : « Si bien qu’hier soir, au lieu de ce fameux “Zola tout seulˮ, qu’on nous avait promis, il nous a fallu remâcher du Georges Ohnet d’hier, redigérer du Sylvestre-Bergerat d’avant-hier, c’est-à-dire des échantillons passablement fatigués de cette fameuse convention dont on prétendait nous affranchir » (Le Théâtre à Paris, 3e série, janvier 1886-août 1887, H Le Soudier, Paris, 1888-1889, p. 419-420).

[15La Revue indépendante, n° 5, mars 1887, op. cit., t. 2, p. 390.

[16Pour tout dire, quand on lit aujourd’hui la pièce de Daudet, il n’est pas évident de deviner d’emblée les raisons pour lesquelles Mallarmé y voyait « ce tableau à demi dans la plastique du théâtre mais déjà aussi dans l’optique idéale […] » – ce qui invite à avancer l’hypothèse d’une solidarité de principe avec la corporation des écrivains, un peu comme si, au-delà des querelles d’école, au-delà des résultats concrets aussi, seule avait compté la démarche… Ibid., p. 388-389.

[17Ibid., p. 390.

[18La Revue indépendante, n° 6, avril 1887, op. cit., t. 3, p. 59.

[19La Revue indépendante, n° 4, février 1887, op. cit., t. 2, p. 197.

[20Ibid., p. 194.

[21Ibid., p. 198.

[22Ibid., p. 198.

[23La Revue indépendante, n° 4, février 1887, op. cit., t. 2, p. 197-198.

[24La Revue indépendante, n° 9, juillet 1887, op. cit., t. 4, p. 59.

[25Lettre de Théodore de Banville, citée dans Œuvres Complètes, éd. Henri Mondor et G. Jean-Aubry, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1945, p. 1441.

[26Le Théâtre Libre, brochure de 1887, op. cit., p. 3.

[27Jean-Pierre Sarrazac, Mise en crise de la forme dramatique, 1880-1910, actes du colloque des 10, 11, 12 décembre 1998, Paris III-Sorbonne Nouvelle, études réunies par Jean-Pierre Sarrazac, Louvain, Études théâtrales, n° 15-16, 1999, p. 7.

[28D’une certaine manière, le poète pratique une lecture que l’on pourrait, anachroniquement, qualifier de « dramaturgique », au double sens du terme : premièrement, parce que son objet est le projet du dramaturge plus que l’histoire et les personnages en eux-mêmes ; deuxièmement, parce qu’il s’attache, de manière assez inédite pour son époque, à la signification des choix scéniques, et à leur adéquation au sens du texte – autrement dit à l’activité que désigne aujourd’hui le mot « dramaturgie » dans son sens allemand, c’est-à-dire la transposition des signes textuels dans un langage autre. Sur ce point, voir le texte de Joseph Danan, dans Qu’est-ce que le théâtre ?, Christian Biet et Christophe Triau (dir.), Paris, Gallimard, 2006, p. 27. Ou encore : Qu’est-ce que la dramaturgie ?, Arles, Actes-Sud, collection « Apprendre », 2010. Sur la pratique mallarméenne de la dramaturgie, on se permet de renvoyer à notre propre étude : « Mallarmé spectateur des Deux Pigeons : un point du vue sur la représentation du voyage dans les ballets », Voyage et Théâtre, du xviie au xixe siècle, L. Guyon et S. Requemora-Gros (dir.), Paris, PUPS, coll. « Imago Mundi », 2011.

[29La Revue indépendante, n° 8, juin 1887, op. cit., t. 3, p. 369.

[30La Revue indépendante, n° 4, février 1887, op. cit., t. 2, p. 195.

[31La Revue indépendante, n° 1, novembre 1886, op. cit., t. 1, p. 39.

[32La Revue indépendante, n° 2, décembre 1886, op. cit., t. 1, p. 247.

[33La Revue indépendante, n° 1, novembre 1886, op. cit., t. 1, p. 40-41.

[34Article repris dans « Crayonné au théâtre », Œuvres Complètes, op. cit., t. 2, p. 196-197.

[35La Revue indépendante, n° 8, juin 1887, op. cit., t. 3, p. 369.

[36La Revue indépendante, n° 4, février 1887, op. cit., t. 2, p. 194.

[37La Revue indépendante, n° 2, décembre 1886, op. cit., t. 1, p. 250.

[38« Chronique de Paris », La Dernière Mode, Œuvres Complètes, op. cit., t. 2, p. 496.

[39Barthes Roland, à propos de la mise en scène du Songe des prisonniers, de Cristopher Fry, par Jean-Louis Barrault, en 1955 : « La vaccine de l’avant-garde », Écrits sur le théâtre, éd. Jean-Louis Rivière, Paris, Seuil, 2002, p. 157.

[40La Revue indépendante, n° 6, avril 1887, op. cit., t. 3, p. 58.

[41Idem.

[42Ibid., p. 59.

[43« Crayonné au théâtre », Œuvres complètes, op. cit., t. 2, p. 186. Les « Notes sur le théâtre » parlaient d’une « libre vision spirituelle », La Revue indépendante, n° 5, mars 1887, op. cit., t. 2, p. 388.

[44La Revue indépendante, n° 2, décembre 1886, op. cit., t. 1, p. 246.

[45La Revue indépendante, n° 3, janvier 1887, op. cit., t. 2, p. 57-58.

[46Francisque Sarcey commence ainsi son compte-rendu : « Hamlet ! voyez-vous, c’est plus fort que moi ; je ne peux venir à bout de m’y plaire. […] À la lecture, ça va bien. Je ne suis pas assez dépourvu de toute intelligence et de tout goût littéraire pour ne pas sentir, même à la traduction, l’extrême mérite de certains morceaux, pour ne pas être transporté par la grandeur de quelques scènes. Mais au théâtre, je ne suis que public. » Et plus loin, il ajoute « Et puis, au théâtre, est-ce que j’ai le loisir et le goût de me faire toutes ses réflexions ? » (Quarante ans de théâtre : feuilletons dramatiques. La tragédie (Corneille, Racine, Shakespeare, les Grecs), Bibliothèque des Annales politiques et littéraires, t. 3, 1900, p. 356-357.

[47« Revue dramatique », La Revue des deux mondes, septembre-octobre 1886, op. cit., t. 77, p. 942.

[48Ibid., p. 938.

[49Ibid., p. 939.

[50La Revue indépendante, n° 1, novembre 1886, op. cit., t. 1, p. 39.

[51« Menus propos – Le Théâtre », La Jeune Belgique, 9 septembre 1890.

[52La Revue indépendante, n° 8, juin 1887, op. cit., t. 3, p. 369.

[53Ibid., p. 366.

[54La Revue indépendante, n° 2, décembre 1886, op. cit., t. 1, p. 246.

[55La Revue indépendante, n° 4, février 1887, op. cit., t. 2, p. 195.

[56« De l’inutilité absolue de la mise en scène exacte », La Revue d’art dramatique, 1er mai 1891, Genève Slatkine reprints, 1971, t. 22, p. 181.

[57La Revue indépendante, n° 1, novembre 1886, t. 1, p. 41.

[58Ibid., p. 39.

[59Ibid., p. 42.

[60Ibid., p. 40.

[61Ibid., p. 42.

[62La Revue indépendante, n° 6, avril 1887, t. 3, p. 60.

[63Antoine, l’invention de la mise en scène : anthologie des textes d’André Antoine, éd. Jean-Pierre Sarrazac et Philippe Marcerou, Arles, Actes Sud / CNT, 1999, p. 113.

[64Jacques Copeau, Registres III, Appels, Paris, Gallimard, 1974, p. 26.


Pour citer l'article:

Alice FOLCO, « Portrait de Stéphane Mallarmé en spectateur » in Mallarmé herméneute, Actes du colloque organisé à l’Université de Rouen en novembre 2013, publiés par Thierry Roger (CÉRÉdI).
(c) Publications numériques du CÉRÉdI, "Actes de colloques et journées d'étude (ISSN 1775-4054)", n° 10, 2014.

URL: http://ceredi.labos.univ-rouen.fr/public/?portrait-de-stephane-mallarme-en.html

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